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Pourquoi belle et triste

©Le Berlinographe

Arrivée en avance à l’aéroport. Temps pour un café au soleil. Ciel bleu. Il paraît qu’il fait chaud à Berlin. Retour sous la lumière du printemps. Sourire. Renaissance bienvenue. Je sors mon carnet par réflexe, mon crayon attend entre mes doigts avides. A quelques mètres de moi une femme. La tête entre ses mains, les lèvres bercées par quelques fines larmes. Son sac à ses pieds. Perchée sur son tabouret. Oiseau triste sur sa branche. Je pense à Belle et Triste, librairie à Wedding. Alors à défaut d’être héroïne de roman elle sera mon personnage d’aujourd’hui. Je prends mon crayon pour la consoler. Pourquoi pleures-tu ma douce ? Un amour perdu bien sûr… En fait je sais pourquoi tu pleures. Je l’ai vu ce beau garçon partir, l’ai croisé à vrai dire. Le sac sur l’épaule, le regard fixe, un peu morne, un peu triste oui. Je crois qu’il était triste aussi tu sais. Il marchait droit, ne s’est pas retourné, peut-être par peur de ne plus savoir continuer. Tu as attendu qu’il disparaisse pour libérer tes yeux, tes mains tremblantes, sans un regard autour de toi. Belle et Triste.

Mais sous ma plume, jolie larme, les histoires sont amoureuses. Perchée là sur ta branche, si frêle, si légère, je parie que tu n’as rien mangé. J’ai peur que la brise te renverse, mais ta nuque est droite, ton dos ne courbe pas, tu règnes sur cette table, sur ce hall, sur cet aéroport. Sous ma plume douce enfant, je vois son visage derrière la vitre, il t’observe, il est revenu, ses yeux brillants dans le soleil il te regarde pleurer. Tes larmes le rassurent. Tu l’aimes alors, pour de vrai ? Tes sourires étaient pour lui, pour de vrai ? Tes mots doux dans son oreille ont vraiment existé ? Mais qu’est-ce qu’il fout derrière cette vitre putain ? Qu’est-ce qu’il est en train de faire, à qui ment-il en écrasant ton cœur, en reniant votre lien ?

Soudain tu lèves la tête, je regarde avec toi mais il a disparu. J’attends avec toi, le cœur battant, j’attends de voir sa silhouette à l’autre bout du hall, j’attends son cri, qu’il hurle ton prénom, j’attends ses pas précipités, ses bras qui t’enserrent, sa bouche sur la tienne, ses doigts dans tes cheveux, j’attends son cœur qui bat pour toi, qui bat pour vous deux.
J’entends son cœur qui bat. Mais seul. Dehors. Loin de la vitre. Parce que ma plume ne le fera pas revenir. Trop pure pour ses mensonges, ta vérité est une bien meilleure compagnie. Touché, il ne saura t’aimer s’il ne s’aime pas lui-même. Aimer pour deux, c’est pas du jeu, alors oublie. Les meilleures choses méritent qu’on les savoure, tu me l’as dit toi-même. Coupables à deux d’avoir cru, en deux semaines, construire un amour éternel.

Pleure ma belle, ma douce Jule, pleure, mais très vite souris. Parce qu’il fait chaud à Berlin, je te le garantis.

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Auteur·e

julietirard

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