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Comment c'était Abidjan? - Partie 2

bassam_tereso
©Le Berlinographe

Abidjan. Souvenirs.

Sortir du marché, respirer mieux, ouvrir grands les yeux devant des escargots d’un autre monde, avancer dans le sable, les oreilles qui palpitent au son des taxis, suivre le son d’un chant, observer une prière, derrière on joue au foot, derrière encore, musique électronique. Retourner en arrière, traverser le pont, la lagune, le soleil qui se couche, deux pêcheurs en pirogue. Le soleil qui s’endort, la brise du soir se fait attendre, marcher dans la terre, le quartier colonial, des enfants qui se cachent, « les Blancs, eh les Blancs ! ». Musée des costumes, fours de céramique, hôtels, maquis. Rejoindre les autres au bord de la piscine, odeurs de bière, odeurs de cigarettes, il y a des choses qui traversent les frontières. Oublier Internet, il n’y en a pas, oublier les légumes, on évite ça, partager, échanger, discuter, rire ensemble. S’insurger, s’engueuler, nager, danser ensemble. Prendre son courage à deux mains, descendre sur le sable et affronter la mer, tremper les pieds jusqu’aux chevilles, s’enhardir, aller jusqu’aux genoux, narguer la mer, jusqu’à ce qu’elle nous écrase, le ressac est trop fort, on s’écrase, le sable qui s’infiltre, qui nous noie, des bras qui nous attrapent, il s’en est fallu de peu, retrouver l’eau claire de la piscine, s’y noyer volontiers. Sursauter quand les dragons oranges traversent sous nos pas, guetter le bruit des crabes, la nuit, sur le chemin du sommeil. Y voir des mygales, y voir des rats, même s’ils sont loin de là. Sursauter dans la nuit, la clim’ qui prend feu, la douche qui ne coule plus, la porte qui ne ferme plus. Mais rire, rire toujours. Attendre le taxi, monter à six dedans, la fesse gauche sur le frein à main, la fesse droite sur les genoux d’un A. qui programme déjà le mariage. Et rire, rire toujours. Se perdre au marché, se trouver au supermarché, comparer les prix, et surtout les produits, acheter du talc Obama, parce qu’il y a de quoi rire, rire encore. Râler devant le riz, se régaler de l’aloco, s’étouffer au gingembre, savourer le bissap. S’étonner du temps, du vent, du soleil sournois qui nous brûle, sauter dans l’eau, sauter dans le sable, sauter plus haut, prendre en photo, se prendre en photo, s’agglutiner sous l’objectif, sourire, toujours sourire. Et puis se lire, s’écouter, partager quelques instants de nos vies à nous, nos subjectivités, nos points communs, l’amour de l’écriture, l’amour du récit. Mondoconteurs. Dealers de rêves éveillés,  morceaux de nos réalités. S’écouter. Ecrire, toujours écrire.

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Auteur·e

julietirard

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