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Comment c'était Noël? Berlinois.

du chou rouge, du chocolat, des pommes, du chocolat...
©Le Berlinographe

Mardi 24. Ai passé la journée enroulée dans ma couverture, guettant le livreur entre les chapitres de mon livre fraîchement emprunté à la bibliothèque de l’Institut Français. 17h00. Lasse d’attendre celui qui ne viendra plus, je pose mon livre désormais achevé, me met en route pour Reinickendorf. Mathieu s’ennuie, il a fini de tout préparer. Ma rue est noire, la Hasenheide est vide, désertée. Restaurants : fermés. Magasins : fermés. Lampadaires : pas plus lumineux que d’habitude. Dans la U8, des cadeaux, beaucoup de cadeaux, c’est amusant. Vingt minutes plus tard, je sors à Residenzstr., quartier résidentiel et familial, des décorations à toutes les fenêtres, je souris, enfin. C’est Noël non ? De loin, entre un père noël gonflable et un rêne lumineux je vois Mathieu sur son balcon, cigarette à la main. Derrière la baie vitrée j’aperçois la télé allumée. Envie d’un dessin animé.

1h00. Trois Disney Pixar et beaucoup de chocolat plus tard, retour dans la U8, fatiguée. Cette fois plus de cadeaux, peu de familles mais beaucoup, beaucoup de bières et de jeunes éméchés. Une nuit comme celles des samedis. Appel de Cross.

-Jule, on sort au Stattbad tu viens ?
-En club ? C’est Noël !
-Ben justement, grosse soirée.
-Vous sortez en club à Noël ?
-Bah oui, comme tous les ans.

Bienvenue à Berlin.

Mercredi 25. 12h00. Martin arrive chez moi avec sa barbe de Père Noël et dans son sac un poulet, du chocolat, du chou rouge à la pomme, du chocolat, des mandarines, des knödel, du chocolat, des noix, des pommes, du chocolat, de quoi faire du vin chaud, et des bougies à la lavande. Histoire que ça te rappelle un peu ton sud de la France. Martin passe en cuisine, je dresse la table, remplis un plateau de noix et de mandarines, allume les bougies, pense à Mathieu. J’attrape mon portable, écris un message.

-Hey Mat, bien dormi ?
-Pas dormi. Je suis sur un banc. Dans un parc.
-Passe à la maison, on n’a pas commencé !
-Je suis pas « en état » Jule…

Je pose mon téléphone. Une minute de silence. Je pense au jour où quelqu’un m’appellera pour me dire qu’on a retrouvé Mathieu sur un banc.

16h00. Mathieu est assis à table, le regard vide, il serre ma couverture entre ses bras, sourit quand même, culpabilise beaucoup, et mange quelques chocolats.

18h00. Message de Max, Martin part travailler, du monde au restaurant.

19h00. Je pousse les assiettes, fais un peu de place à mon cahier, Mathieu s’est endormi dans son fauteuil, sa main posée sur mon bras, les yeux cerclés de noir. J’ai encore trop de mal à poser mes yeux sur lui, à parler avec lui, et même dans le silence, sa présence n’est qu’une absence. De lui, de tout. Ma lèvre tremble, mon crayon aussi. Je le veux loin, le plus loin possible, je pousse sa main.

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Auteur·e

julietirard

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