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Comment Berlin crée à la ligne

Je me fais un plaisir de glisser entre les lignes
©Le Berlinographe

A Berlin il y a quelque chose de l’ordre du pas fini. Un entre-deux. Une volonté de. Probablement ce qui fait que les créateurs s’y sentent si bien. Artistes de tout milieux mais aussi entrepreneurs entreprenants. Il y a encore de la place. Pour soi, pour rêver, imaginer, participer. Je rêve, imagine, assise dans le S-Bahn, tranquille, de Jannowitzbrücke je rejoins Lichtenberg, appareil à la main. Ostkreuz, des travaux, Warschauer Str., des travaux. Partout des pierres, des grillages, des machines, pas d’homme bizarrement. Jamais vu d’hommes sur cette ligne. Tranquille. Le gris du ciel n’apporte aucune tristesse, l’immobile aucune parenthèse, ces scènes vivent, comme l’œuvre inachevée. Une toile inachevée, un texte en cours, une virgule, Berlin se ponctue de virgules, l’Etat construit les lignes, les hommes se font un plaisir de s’y glisser. Je me fais un plaisir de glisser entre les lignes, les lignes du S-Bahn, appareil à la main.

Quatre heures du matin, je rejoins Cross, ambiance noircie pour mieux colorer la ville, entre les pierres, entre les tuiles, histoires de toit, encore. Le bruit des bombes qu’on secoue résonne et se lie, grattement de la bille sur la feuille, j’écris, il peint, on rêve, on imagine, on bouge, on vibre, au rythme de la création, perpétuelle création qui comble les vides laissés par notre Berlin ensommeillée. Sous la ligne du sol, sur les lignes du toit, aspirons les lignes, fusion, occupons l’immense espace. Créer. La ligne se meut en courbe, enveloppe, réchauffe, rassure, libère en fait. Libère.

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Auteur·e

julietirard

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